Introduction au texte de la chanson "Deux de la Wehrmacht"
Tiré du recueil "Chansons que tout cela" de Gilles, nouvelle édition augmentée, paru aux Éditions Rencontre à Lausanne en 1970

Cependant, de l'autre côté du Rhin, on assiste à une petite flambée de militarisme. Est-ce qu'ils vont se remettre à dérailler ? Les leçons de l'histoire seront-elles donc toujours perdues ? Avec eux, on ne sait jamais. Il ne s'agit peut-être que d'une rechute passagère sans conséquence.

DEUX DE LA WEHRMACHT

–  Excusez-moi! Mon nom est Spunde,
Doktor Max Spunde von Stuttgart.
–  Mon nom ? – je suis de Peenemunde –
Est Kaporal Fritz Eberhardt.
Nous sommes venus, vieux Kameraden,
Revoir unser lieber Paris,
Où nous avons fait la parade
Dans les Champs-Elysées jadis!
Beaux souvenirs de l'an quarante,
Es war so schön; la Tour Eiffel…
Ma Bertha était si contente
À la Propaganda Staffel.
Mais vous, la chos' nous a surpris,
Vous nous avez jamais compris.
Qu'importe puisque malgré tout
La Wehrmacht est toujours debout!

–  Quand ils menaçaient l'Angleterre..
–  Qui donc ? – les Russ's, Kaporal,
C'est nous les Fritz, grands militaires,
Qui avons barré le canal.
Si la Wehrmacht, je le proclame,
Veillait sur l'Europ' nuit et jour,
C'était pour protéger vos femmes
Contre les cosaqu's de l'Amour!
Jamais un mot de gratitude,
Français, vous n'étiez pas gentils!
C'est à caus' de votre attitude
Qu'un beau jour nous sommes partis.
Dommag' car grâce à nous – c'est vrai –
Vous faisiez déjà des progrès.
Qu'importe, puisque malgré tout
La Wehrmacht est toujours debout!

–  Les Alliés – ces Schweinehunde! –
En attaquant l'Atlantikwall
Ont détruit – nicht wahr Doktor Spunde ? –
Le plan grandiose et kolossal
Du Führer qui, d'Egypte en Chine,
Voulait rejoindr' le Mikado.
Alors fertig Moskou, Staline,
Kaputt les Russes, c'était trop beau!
Pourtant, nous étions tous tranquilles
Pour mille ans, grâce à nous, Germains,
Quand les Anglais, ces imbéciles,
Nous ont fait l' coup d'El-Alamain.
Après Stalingrad, cet enfer,
Ça a brisé le cœur d'Hitler!
Mais, Gott sei Dank! Malgré ces fous,
La Wehrmacht est toujours debout!

L'Amériqu' qui armait les Russes
–  L'idiot – par avion, par bateau,
S'est trouvée un jour seule en Prusse,
Sans nous, face à l'Homme au Couteau.
C'est l'heure enfin de la Justice;
On nous implor', nous les Allemands,
Mais c'est nous d'mander service,
Die hochste Zeit: l' dernier moment!
Nous somm's venus, amis sincères
De la Franc', nous disons surtout:
"Français n'attendez pas la guerre
Pour nous fair' revenir chez vous!
N'oubliez pas de convoquer
Unser gross' Général Ramcke
Car, Gott sei Dank! Malgré les fous,
La Wehrmacht est toujours debout!

Cousin' Germain', tout' l'Amérique
Serait heureus' de nous revoir,
Mais Paris est si artistique,
Nicht wahr Fritz ? – so lustig le soir!
Nous viendrons volontiers sur place
Avec nos tanks et nos drapeaux,
Nos S.S., nos avions de chasse
Et notre bonn' vieill' Gestapo,
Vous apporter, face aux barbares
Bolcheviks, buveurs de vodka:
Ordre, Travail, Schlague et Cithare,
L'immensa pax germanica!
Deutschland, Deutschland! Malgré Roos'velt
Ach! Ûber alles in der Welt!
Est c'est pour ça que, malgré tout,
La Wehrmacht est toujours debout!

Hossegor, août 1951
© Fondation Jean Villard-Gilles